Le document reconnaît que les connaissances sont limitées sur ce sujet, recherche activement les directives bibliques et invite tout à chacun à aimer les transsexuels.
Les membres du Comité exécutif de l’Église adventiste du septième jour ont voté une déclaration sur le « transgendérisme », le 11 avril dernier. Le texte a été voté dès le premier jour de la Rencontre de printemps, l’un des deux conseils administratifs de l’Église mondiale.
Bien que le document de 1400 mots souligne « une connaissance limitée dans certains domaines spécifiques, » il s’évertue néanmoins à définir tout d’abord les termes clés communément utilisés en référence à ce sujet ; il passe ensuite en revue les principes bibliques relatifs à la sexualité et à ce qu’il qualifie de « phénomène transsexuel. »
La section traitant des principes bibliques est fondée sur la croyance que « Les Écritures proposent des principes propres à diriger et à conseiller les transsexuels et l’Église, transcende ainsi les conventions humaines et la culture. » Finalement, quelques conseils figurent à l’intention des responsables d’église et des membres côtoyant des transsexuels, fussent-ils visiteurs ou membres inscrits au sein de leurs congrégations locales.
Définition et processus
Citant la dernière édition du Manuel de diagnostics et de statistiques des troubles mentaux, (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) le document souligne que le transgendérisme, anciennement appelé « trouble de l’identité du genre » et aujourd’hui rebaptisé « dysphorie du genre », peut généralement être compris comme un terme décrivant une multitude de façons pour l’individu d’exprimer son identité sexuelle, différemment de la norme conventionnelle, fondée sur le sexe hérité biologiquement à la naissance. « La dysphorie du genre » se manifeste de diverses façons, notamment par l’expression d’un profond désir d’être traité comme quelqu’un du sexe opposé ou par un profond désir de se débarrasser de son identité sexuelle hérité à la naissance ou encore par l’expression de l’intime conviction que l’on est habité par les sentiments et les réactions typiques au sexe opposé.
Le document avance que « la tendance contemporaine est de rejeter la binarité du genre telle qu’elle est présentée bibliquement (mâle et femelle) pour la remplacer par une palette croissante de types de genre, certains choix générés par la condition liée au transgendérisme, sont maintenant considérés comme normaux et acceptés culturellement. » Selon le document, ces tendances posent problèmes aux personnes croyant en la bible, vu que « le désir de changer ou de vivre en tant que personne du sexe opposé pourrait donner lieu à des choix de style de vie inapproprié d’un point de vue biblique. »
« Ce n’est pas un sujet facile à traiter, » a admis le pasteur Ted Wilson, président de l’église mondiale, en introduisant sa pensée derrière la déclaration, « nous n’avions rien d’écrit spécifiquement quant à ce sujet particulier. » Et Ted Wilson d’expliquer que le document se focalisait sur l’élaboration d’un cadre biblique permettant d’établir une base à partir de laquelle pourrait être traité le sujet et non sur des cas précis. Ensuite, il a ajouté que « chaque région pouvait utiliser ce cadre biblique pour déboucher sur une application appropriée localement. »
Ted Wilson a aussi révélé qu’un effort considérable avait été consenti afin d’impliquer le plus d’experts possibles en la matière. Ses propos ont été repris par Artur Stele, un vice-président de la Conférence générale et président de la commission chargée de préparer le document. « Bien des groupes et des comités ont été impliqués dans l’élaboration des directives et des conseils, » a déclaré A. Stele. Selon lui, l’Institut de Recherches bibliques, l’un des collaborateurs pour l’élaboration du document, « a recherché activement l’avis, les conseils et l’opinion de théologiens, spécialistes médicaux et psychologues, tant ceux faisant partie de l’Église que ceux n’en faisant pas partie. » L’objectif principal du comité était de trouver une approche biblique et christique, a-t-il déclaré.
Un bref résumé historique
Le directeur de l’Institut de recherches bibliques, Brasil de Souza, a fait un bref récapitulatif des débuts de ce processus, lancé officieusement lorsque Angel Manuel Rodriguez, l’ancien directeur de cet Institut, a publié un article intitulé « Chirurgie de changement de sexe. Une opinion » (Sex-Change Surgery—An Opinion) dans la newsletter de l’organisation en avril 2008.
Déjà depuis 2013, l’Institut de recherches bibliques a commencé à recevoir des requêtes de toutes les parties du globe requérant des conseils sur des situations particulières, notamment le mariage de transsexuels et la pétition pour l’obtention d’un changement de nom du certificat de baptême. Selon Brasil de Souza, ce genre de situation a marqué les débuts d’un long processus.
Planifiée au départ pour figurer à l’ordre du jour du Conseil annuel d’octobre 2016, il a ensuite été décidé d’ajourner la présentation de la déclaration jusqu’à la Rencontre du printemps de 2017, afin de permettre une étude plus approfondie du sujet.
La version proposée aux membres du Comité exécutif est tout de même la 21ème version et selon l’un des dirigeants, elle ne devait pas être la dernière version.
Principes bibliques
La déclaration est basée sur la conviction que même si la Bible ne mentionne pas précisément le transgendérisme, quelques principes en découlent pouvant alimenter la discussion sur le sujet, plus particulièrement ceux basés sur l’histoire de la création. Ainsi, il nous est rappelé que « Dieu créa l’humanité avec deux personnes au départ, identifiées respectivement en tant que mâle et femelle, établissant ainsi les genres » et que « le récit biblique lie inextricablement le genre au sexe biologique, ne faisant aucune distinction entre les deux. » Le document met aussi l’emphase sur le fait que les êtres humains sont des unités psychosomatiques. « Ainsi donc » est-il écrit, « l’identité sexuelle ne peut être établie indépendamment du corps. »
La déclaration rappelle également qu’à cause du péché, « nos émotions, nos sentiments et nos perceptions ne sont pas des indicateurs absolument fiables en ce qui concerne les desseins, les idéaux et la vérité venant de Dieu. » Pour cette raison, poursuit le document, « bien que la dysphorie du genre ne soit pas intrinsèquement un péché, elle peut donner lieu à des choix menant au péché », un autre indicateur du document est que « sur un plan personnel, les humains sont impliqués dans la grande controverse. »
Implications pour la vie de l’Église
Au sein de la vie d’une église locale, toujours selon le document, « aussi longtemps que les transsexuels s’efforcent de vivre leurs vies d’après les enseignements bibliques en ce qui concerne la sexualité et le mariage, ils peuvent être membres de l’Église adventiste du septième jour. » « De plus, l’Église exhorte vivement les transsexuels à s’abstenir de toute chirurgie de réattribution sexuelle ou de mariage s’ils ont subi une telle intervention. »
Soulignant des principes bibliques supplémentaires en ce qui concerne l’amour et la compassion, le document rappelle à la mémoire que « la Bible ordonne à tous ceux qui se disent disciples du Christ, d’aimer tout le monde, » et à les traiter « avec dignité et respect. » Dans cette même veine de pensée, il est écrit « Des actes visant à ridiculiser, abuser ou maltraiter les transsexuels sont incompatibles avec ce commandement biblique : aimez-vous les uns les autres. » De plus, l’Église est appelée à être « un refuge, un lieu d’espoir, de soin et de compréhension pour tous ceux qui sont perplexes, souffrants, en lutte et solitaires. »
Comme pour tout autre péché, le document rappelle que « les péchés à caractère sexuels commis par les hétérosexuels, les homosexuels, les transsexuels ou tout autre catégorie de personnes, peuvent être pardonnés et les vies peuvent être transformées à travers la foi en Jésus-Christ. »
En conclusion, ceux qui ressentent une incongruité entre leur sexe biologique et leur genre identitaire, sont exhortés « à méditer sur le plan originel de Dieu quant à la pureté et la fidélité sexuelle. » Le document se termine en affirmant que « les transsexuels aussi bien que tous les croyants sont invités à se confier en Dieu et à recevoir dans son intégralité la compassion divine, la paix et la grâce, dans l’attente du prochain retour de Jésus quand tous les vrais disciples du Christ seront restaurés complètement à l’idéal divin. »
Réactions de l’assemblée
La majorité des intervenants sur ce sujet se sont accordés à dire que cette déclaration n’était pas une conclusion finale sur le sujet du transgendérisme, mais plutôt une étape dans un processus toujours en cours. Du moins était-ce le ressenti de cette majorité. Ils ont exprimé leur appréciation devant le fait que l’Église se soit décidé à se prononcer sur le sujet. « Nous apprécions vraiment vos efforts, » a déclaré Andrea Luxton, présidente de l’Université d’Andrews, entre autres personnes en ajoutant « merci pour la préparation de ce document. »
« Je sais que tout n’a pas été résolu, » a déclaré Neil Nedley, une des membres laïques siégeant au sein du Comité exécutif. « Le processus devra certainement suivre son cours. »
De son côté, l’ancien directeur du département de la santé au niveau de l’Église mondiale, Allan Handysides, a fait un plaidoyer passionné, encourageant tout un chacun à ne pas considérer cette condition juste comme un « phénomène ». « Nous avons affaire ici à des personnes de chair et de sang, » a-t-il déclaré. « Les transsexuels sont des êtres humains. »
Allan Handysides a mis l’emphase sur le fait que parfois les membres d’église sont assez éloignés de la réalité que représente ce phénomène. Se basant sur sa vaste expérience en tant que médecin, il a personnalisé les implications de cette déclaration. « Avez-vous déjà dû dire à des parents que vous n’étiez pas certains du sexe de leur nouveau-né ? a-t-il demandé. « Votre enfant est-il déjà venu vers vous pour vous déclarer qu’il n’était pas sûr d’être un garçon ? Ou pour vous dire qu’il aime d’autres garçons ? Pouvez-vous seulement imaginer ce que l’on peut ressentir ? » a-t-il déclaré.
Il a conclu son intervention en rappelant à son auditoire que les croyants devraient toujours accorder la priorité à l’être humain caché derrière le phénomène. « Nous devrions faire de notre mieux afin de considérer d’abord la personne. »
Ted Wilson a fait écho à plusieurs commentaires faits par l’assemblée. « Bien qu’il soit tout à fait possible d’apporter des améliorations au présent document, notre objectif n’est pas d’éloigner les gens de Jésus, » a-t-il ajouté. « Nous voulons que tous, indépendamment de leur situation actuelle, se sentent les bienvenus au pied de la croix. »
Dans le sillage des discussions de l’assemblée, la déclaration a été votée par le Comité exécutif, sous réserve de légers changements au niveau de la formulation du présent document, suite à d’éventuels commentaires et suggestions émanant des membres du Comité exécutif.
« Ce sujet est comme une cible mouvante, » a déclaré Peter Landless, docteur en médecine et actuel directeur du département de la santé au niveau de la Conférence générale, « où les explications, la compréhension et les idées ne cessent de changer et de varier chaque jour qui passe soit dans la presse populaire ou dans les magazines spécialisés. »
Peter Landless a déclaré que nous devrions nous rappeler toujours que quel que soit la situation à laquelle nous sommes confrontées, nous avons affaire à des êtres humains. « Christ est notre exemple et nous a montré comment réagir avec empathie et démontrer par nos pensées et nos actions à quel point notre mission envers autrui est précieuse. » « Tout ce que nous pourrions faire et dire devraient être empreints de l’amour et de la compassion qui viennent du Christ. »
Vous pouvez prendre connaissance du document en cliquant ici.
Source : Adventist Review/BIA