17 juin 2021 | Clapiers | Johanna Souil et Christiane Kapitz | Newsletter du Foyer du Romarin
» J’ai eu la chance de pouvoir traverser cette période sans perte humaine, et je crois aujourd’hui que c’est essentiel pour se projeter vers demain. Il est important de dire que bon nombre de directeurs, de médecins coordinateurs, de soignants, ont vu un véritable tsunami s’abattre sur leurs structures souvent de façon très brutale et soudaine, et ont dû faire face dans une impuissance et une méconnaissance, à des décès en cascade…. Je mesure ma chance de ne pas faire partie de ceux-là.
Au-delà de cette chance, nous avons su instaurer, pendant cette année, instaurer encore plus que d’habitude, collaboration, entraide et solidarité. C’est ce qui nous a permis de maintenir le cap et de continuer à fonctionner avec des salariés présents et soudés pour faire-face.
Il a donc fallu aussi, pendant cette période de crise, se réinventer et garder ainsi, au-delà de la peur, de l’urgence, de l’inconnu, la nécessité de continuer à fonctionner ensemble et force est de constater que même s’il n’y a pas d’idéal, cette humanité et cette transparence dans la relation à l’autre est un fonctionnement de travail qui produit ses fruits et qui donne pour moi, encore plus d’importance à cette réussite. »
Johanna SOUIL
RÉTROSPECTIVE ET PROJETS…
Qu’est-ce qui caractérise cette période, en termes de changements, par rapport au confinement ?
Nous sommes revenus à une « pseudo-normalité » puisque nous avons repris un fonctionnement plus normal de structure médico-sociale, avec un point essentiel qui nous caractérise dans la démarche qualité : respect d’un lieu de vie personnalisé dans du collectif et liberté d’aller et de venir comme chez soi. Il n’y a plus de différence entre les vaccinés et les non-vaccinés dans les visites et les sorties.
Les visites se font librement, même si les repas et les goûters ensemble ne sont pas encore possibles. Nous continuons à préconiser à chacun de ne pas se retrouver dans les chambres, de multiplier les sorties et notamment dans le cadre d’événements familiaux importants (grand nombre), mais de privilégier les rencontres dans les lieux communs et les visites l’après-midi.
Comment les résidents ont-ils vécu ces derniers mois, et plus largement ces événements qui les coupaient de leurs proches ?
Chacun des résidents a fait preuve de beaucoup de résilience pendant ces mois difficiles et c’est une vraie leçon de vie que tous, nous avons tiré de ce que nous avons vécu à travers eux. C’est une génération qui a vécu la guerre, habituée dans ses souvenirs à la dure réalité de ces temps fragiles et qui connaît – et appréhende – la frustration. Cela n’a en rien enlevé la « difficulté », la « douleur », et « le manque » de ne plus voir les siens, ou en tout cas de les voir différemment, à travers un écran, une paroi… Je crois que c’est le « voir autrement » qui a été le plus douloureux. Parce que se voir sans contact physique est une douleur difficile à gérer quand on est dans l’affect, et que les liens familiaux, amicaux, créés par ces moments de visite, ne peuvent plus continuer à s’exprimer.
Il est difficile, aujourd’hui, de réamorcer les visites sans autoriser les moments conviviaux tels que les repas et les goûters en commun…
Nous sommes conscients de cette réalité et de la frustration accumulée pendant cette période et qui aujourd’hui explose. Cependant, nous devons être garants de la sécurité. Des choses difficiles à concilier.
Cela nous a permis d’envisager un futur plus « connecté », mais adapté à la réalité de notre EHPAD : télévision connectée dans les chambres, avec chaîne dédiée et diffusion des animations ainsi que possibilité d’interaction avec les familles dans un cadre défini, mais sans nécessité de mobilisation d’un soignant.
Quel est le bilan de cette période et quelles sont les priorités ?
Les projets qui étaient prévus ont dû être mis en « standby » pendant quelques mois, car les interactions et les entrées et sorties de l’établissement étaient limitées. C’est le cas pour la rénovation du secteur de « L’Empathie » et pour la formation Montessori pour les équipes soignantes des unités protégées. Nous espérons vivement les mettre en œuvre dès le mois de septembre prochain.
L’intervention des bénévoles pour l’animation a été interrompue pendant toute cette période. Nous avons néanmoins choisi récemment (mois de mars) de reprendre les animations dites « thérapeutiques », notamment dans le cadre du PASA qui a repris son activité initiale : art thérapie, ateliers psychologue, zoothérapie…
Nous avons réussi à revoir nos projets et à prioriser certains d’entre eux. C’est le cas du « Jardin thérapeutique » qui pouvait être mis en place en parallèle de la crise sanitaire (interventions à l’extérieur) et du Projet d’Établissement. Les réunions de travail et les formations internes ont été assurées à distance, par Zoom. Ceci nous a permis de continuer à avancer et à être porteurs de changements au-delà des situations d’urgence auxquelles nous devions faire face. Nous avons ainsi trouvé un nouvel élan et redynamisé les équipes.
En Conclusion
Cette crise, dans sa dure réalité, nous a fait avancer et grandir, mais cela nous a fait plus que jamais toucher du doigt qu’au-delà du progrès et de ce qu’est l’humanité en 2021, nous restons peu de choses et sans maîtrise de tant d’éléments.
Plus encore qu’auparavant, notre réalité dans le « prendre soin » et dans « l’accompagnement » est de toujours faire au mieux (visée éthique), en acceptant qu’il arrive que les décisions prises soient simplement « moins pires » (réalité éthique). C’est dans cette dynamique que nous avançons ensemble, ainsi que dans les valeurs et l’expertise pluridisciplinaire partagée.
(Propos recueillis auprès de Johanna SOUIL par Christiane Kapitz)
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