L’un des historiens de l’Église, David Trim, souhaite que les adventistes du septième jour apprécient mieux leur héritage. « La conscience des victoires du passé, et même des manquements, peut renforcer le sentiment d’appartenance identitaire des membres, leur confiance et leur objectif »affirme t’il.
Récemment élu à la tête du bureau des « Archives, statistiques et de la recherche » qui se trouve dans les locaux de la Conférence Générale, D. Trim affine l’impact et améliore la visibilité du département : il collabore avec les autres bureaux d’archives adventistes, propose un quiz sur l’histoire adventiste sur un espace Twitter de plus en plus important et présente des séminaires sur l’histoire de l’Église aux églises et aux établissements scolaires privés dans le monde entier.
Cet érudit anglais est titulaire d’un Doctorat avec une thèse portant sur les guerres de religion post-réforme et il en a bien le look. Selon le service de presse adventiste ANN, il doit être le seul employé de la Conférence Générale à porter un gilet brocart brodé et une montre gousset avec d’autres tenues, dont une paire de bottes de cowboy toute aussi étrange, bottes qu’il a portées alors qu’il visitait le département d’Histoire de l’Université adventiste de « Pacific Union College ».
Il énumère des dates avec facilité et se passionne à expliquer les nouvelles recherches. Il s’est adressé un jour à la Chambre du Parlement, devant un auditoire de législateurs, de nobles et de journalistes, au sujet de l’histoire de l’action humanitaire, sujet sur lequel il a récemment publié un livre.
D. Trim, à 42 ans, espère défaire quelques idées fausses sur son département ; comme par exemple qu’il ne servirait uniquement qu’à archiver « toutes les choses adventistes », ou qu’il n’offrirait que très peu de services à côté du rapport annuel des statistiques adventistes et de l’agenda annuel de l’Église.
Il affirme catégoriquement que le service des archives ne détient pas une copie du certificat de baptême de chaque membre ; il sert d’archive au matériel produit par la Conférence Générale. Mais, parmi les 1,7 millions de documents numérisés et mots clés que l’on peut maintenant rechercher en ligne sur « adventistarchives.org », le département est fier de sa collection complète des périodiques de l’Église depuis les tout premiers magazines publiés par les Millérites dans les années 1840 jusqu’à nos jours. Les archives hébergent aussi les minutes de chaque comité exécutif de l’Église depuis que les dirigeants se sont réunis pour la première fois en 1889.
A présent, D. Trim souhaite élargir la collection en ligne et inclure davantage de documents authentiques, dans un sens historique, du matériel non publié comme des lettres et des notes qui reflètent le côté plus personnel et privé des dirigeants de l’Église. Il souhaite aussi s’attaquer au défi d’archiver des emails, des clips vidéo et d’autres médias électroniques. Imprimer et ficher une présentation PowerPoint n’est pas pratique et ne permet pas de documenter complètement ce moyen de communication, dit-il.
Archiver les sites web de l’Église, en particulier les sites sociaux, qui sont en constante évolution, est également difficile, et présente de nouvelles responsabilités légales. Toutefois des solutions existent. « Nous avons la technologie », dit D. Trim, en citant la phrase extraite du feuilleton américain de science-fiction des années 1970, « l’homme qui valait 3 milliards ».
Mais, au cas où les membres ne seraient pas au courant, une base de données de l’histoire de l’Église consiste en un peu plus que de collecter les « poussières virtuelles ». D’où les séminaires de D. Trim, les récents articles dans les revues adventistes et l’enthousiasme intense dont il fait preuve lorsqu’il discute des aspects les plus obscures de l’histoire adventiste.
Récemment, en faisant des recherches sur l’activité de l’Église pendant la seconde guerre mondiale, il a appris que plutôt que d’adopter un profil bas (réaction plausible dans des temps instables), l’administration adventiste a développé l’évangélisation de manière significative au Moyen-Orient, en Inde et en Afrique dans les années 1940 et 1950. « C’est incroyable. Il y a eu un engagement important ; c’est parce que nous avions le sentiment de ‘qui’ nous sommes et la croyance que Dieu allait nous qualifier » dit D. Trim.
Lorsque les adventistes perdent de vue leur histoire, le sentiment d’appartenance identitaire et la confiance qui va avec peuvent s’éroder, a-t-il dit.
« Si vous connaissez votre histoire, vous pouvez dire, ‘Ok, nous avons eu des difficultés dans notre église locale ou dans cette région par le passé, mais nous en ressortons plus forts. De plus ce que nous pensons être nos ‘années dorées’ sont venues après ce qui semblait être la fin. Et si cela est arrivé un jour, cela peut arriver encore » dit D. Trim.
Une prise de conscience de nos erreurs passées est tout aussi importante, ajoute D. Trim. Le fait de savoir que les fondateurs de l’Église avaient des défauts, comme nous, peut être « rassurant » dit-il. « Ces personnes ont des pieds d’argile. Ils ne sont pas parfaits. Ainsi nous ne devons pas penser ‘Oh, je ne pourrais jamais aspirer être comme cela’ ».
D. Trim dit que même dans la Bible, la description des gens et des évènements que nous donne Dieu est candide. « Lorsque Dieu dit à son peuple de se souvenir de son histoire, ce qu’il fait à plusieurs reprises, il souhaite qu’ils se souviennent aussi bien de leurs échecs que de leurs victoires ».
« Ellen White, la co-fondatrice de l’Église, a beaucoup écrit sur le fait que la Bible dit la vérité sur les vies des gens, sur le bien et le mal… Mais nous ne le faisons pas. Nous avons tendance à écrire au sujet de nos pionniers de la même façon que les catholiques écrivent au sujet de Marie et des saints du Moyen-Age », dit D. Trim. « C’est comme si nous craignons que s’ils avaient des défauts, cela discrédite alors l’église d’une façon ou d’une autre, ce qui est un non-sens. L’Église est plus grande que n’importe quel individu ».
Ce qui s’applique aux dirigeants de l’Église des origines, s’applique aussi à l’Église dans un sens plus large. Reconnaître les erreurs de l’institution est tout aussi vital, dit D. Trim.
« Si vous prétendez que tout était toujours absolument brillant, alors qu’en vrai, cela ne l’était pas, cela signifie que nous allons répéter les erreurs. Et de la même manière (avec perversité parfois), nous ne serons pas capables de continuer à faire les choses bonnes et avant-gardistes que nous avons fait », dit D. Trim. Par exemple, les premiers missionnaires adventistes étaient formés à la sensibilité culturelle, concept que les dirigeants ont dû complètement ré-imaginer dans les années 1980 parce que les adventistes l’avaient oublié, dit-il.
Une Église qui a une « mémoire institutionnelle » aiguisée peut éviter de « réinventer la roue » dit D. Trim.
La mémoire peut aussi aider les membres d’église à rester optimistes. L’idée que la tâche a été confiée aux adventistes de porter l’Évangile au monde entier peut être intimidante si nous n’avons pas de perspective.
« Je pense que beaucoup d’adventistes (pas tous) ont un peu perdu leur chemin. Nous avons perdu notre confiance en nous-mêmes. Nous avons perdu cette conviction que nous avons quelque chose de vital à apporter au monde » dit D. Trim. « Nous avons besoin de retrouver ce sentiment d’identité missionnaire et notre objectif ».
Mettez un peu de cette perte au crédit de la peur qu’il est quelque peu « arrogant » de penser que les adventistes apportent un message unique duquel tout un chacun peut tirer des bienfaits, dit-il, en suggérant que cette notion découle d’un malentendu sur ce qui conduit l’œuvre missionnaire. « Il ne s’agit pas d’essayer d’enseigner la civilisation occidentale, ce n’est pas ce que nous faisons. Nous avons pour tâche d’aider les individus ».
Un sentiment d’apathie peut également éroder la confiance en soi de l’adventiste. « Trop souvent, les gens pensent, ‘Bon, si nous ne finissons pas l’œuvre de Dieu, il sauvera les gens qui n’ont pas entendu le message » dit D. Trim. Ils concluent ainsi que les efforts d’évangélisation sont contre-productifs, laissant les gens sans l’excuse qu’ils n’ont jamais entendu l’Évangile.
Analyser les raisons d’être de l’évangélisation peut aider les adventistes à obtenir à nouveau un sentiment clair de l’objectif à atteindre et leur fournir une direction, dit D. Trim.
« Les gens disent ‘finissons le travail’. Mais qu’est-ce-que cela signifie ? Cela signifie-t-il accélérer la seconde venue du Christ ? Je ne suis pas sûr que nous ayons vraiment été mandatés pour faire cela. Ce pourquoi nous avons reçus un mandat, c’est ‘allez, faites des disciples’ ».
En fait, amener les gens dans une communauté de foi fait partie des « commandements les plus clairs et non ambigus » que Jésus donne dans le Nouveau Testament, dit D. Trim.
« Jésus ne dit pas, ‘si vous convertissez tant de personnes cette année, alors je viendrais. Sinon tous les paris sont terminés ». Il dit juste « faites des disciples ». Pour moi, ce que nous avons comme message en tant que chrétiens (en tant qu’adventistes) est tellement important pour améliorer la vie des gens et leur apporter plus de sens que ça vaut la peine de le leur annoncer, sans égard de quand Jésus va revenir ».
(Pour déposer une demande du séminaire de D. Trim pour votre église ou pour poser une question sur l’histoire adventiste, envoyez un email à archives@gc.adventist.org).
: ANN/BIA